Suite à la condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité de Philippe Hategekimana, alias Biguma, par la cour d’assises de Paris, le président du Collectif des Parties Civiles pour le Rwanda (CPCR), Alain Gauthier, a exprimé sa gratitude en déclarant : « Merci à la justice. »
Quelques jours avant la clôture du procès, l’accusé Biguma avait choisi de garder le silence, un droit qui, malheureusement pour lui, a joué en sa défaveur. Lors du prononcé du jugement, le juge Jean-Marc Lavergne a souligné que Biguma n’avait jamais exprimé de remords et avait nié toutes les accusations portées contre lui.
Ce matin-là, le tribunal s’est isolé pour répondre à 22 questions, auxquelles il a répondu « oui » pour la plupart, conduisant ainsi à la condamnation à perpétuité.
Qui est Biguma ?
Philippe Manier Hategekimana, alias Biguma, est né à Ntyazo. Ancien enseignant à l’école primaire et responsable de la délivrance des permis de conduire, il a suivi une formation militaire avant de partir étudier en Belgique. À son retour, il a été muté en tant que gendarme, devenant moniteur sportif et formateur en sports de combat pour les jeunes.
Naturalisé français en 2005 sous le nom de Philippe Manier, cet ancien adjudant-chef de la gendarmerie de Nyanza, aujourd’hui âgé de 67 ans, a été accusé d’avoir « participé à une pratique massive et systématique d’exécutions sommaires, d’enlèvements suivis de disparitions, de tortures et d’actes inhumains » à Butare, dans le sud du Rwanda, entre avril et juillet 1994.
Il lui a été reproché d’avoir érigé et contrôlé des barrières sous la responsabilité des gendarmes, d’avoir orchestré le meurtre du bourgmestre Nyagasaza, ainsi que les massacres des collines de Nyabubare et de Nyamure dans la commune de Ntyazo le 27 avril 1994. Il a également été poursuivi pour entente en vue de commettre le génocide, notamment par sa participation à des réunions et aux massacres à l’ISAR Songa, des faits requalifiés suite à l’appel du CPCR.
Un parcours judiciaire complexe
En 2015, à la demande du CPCR et d’autres organisations de défense des droits de l’homme, une enquête a été ouverte par le Parquet National Antiterroriste (PNAT), chargé de la poursuite des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. Cette enquête a confirmé que Hategekimana faisait l’objet de poursuites pour génocide, crimes contre l’humanité et appartenance à un groupe visant à organiser ces crimes.
Après s’être enfui au Cameroun, il a été arrêté en mars 2018 et renvoyé en France, où il a été placé en détention à partir du 15 février 2019. Le 20 septembre 2021, la Cour d’appel a décidé qu’il serait jugé par la cour d’assises.
Le procès de Biguma, qui a débuté le 10 mai 2023 à la cour d’assises de Paris, s’est conclu le 28 juin 2023. Il a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour génocide, crimes contre l’humanité et entente en vue de commettre le génocide.